Selon la philosophie bouddhiste, en-dessous de l’agitation psychologique existe en chaque être humain un espace de calme et de sérénité avec lequel il est possible de se reconnecter pour diminuer le stress de l’existence. Loin de se couper de la réalité, elle propose de vivre l’instant présent sans se laisser emporter par les divagations du mental. Quant à Sigmund Freud, grâce à sa découverte de l’inconscient, il a montré – dans son ouvrage « Psychopathologie de la vie quotidienne » – les difficultés que nous avons à vivre ici et maintenant. De simples lapsus, des oublis de nom ou des actes manqués viennent témoigner des conflits intrapsychiques qui empêchent ce que les bouddhistes zen appellent la pleine conscience…
Prendre du recul par rapport à une vie trépidante constitue la première approche pour gagner en sérénité. Le psychologue Karlfried Graf Dürckheim, auteur du livre « Le centre de l’être », offre quelques indications précieuses…
La réunification
Dürckheim distingue l’essence de l’apparence. La vie, écrit-il, n’est pas la somme de ce qui est vivant, c’est ce qui fait que tout ce qui vit… vit ! L’Être essentiel correspond à ce qui, au plus profond de tout individu, possède la Connaissance. De par ses travaux, le psychologue analytique Carl Gustav Jung arrive aux mêmes conclusions. Prendre conscience de son unité corps/esprit, de sa façon d’être au monde, s’impose comme le premier pas. Ainsi, les thérapies psychocorporelles, le chant, le yoga, les arts martiaux sont autant de méthodes permettant une réunification salvatrice.
La conscience de la respiration
Pour bien comprendre ce qu’est la respiration, explique encore Graf Dürckheim
, il faut se souvenir du symbole taoïste du Yin et du Yang. Ce symbole représente le grand mouvement de la Vie qui est toujours en train de créer des formes. Porter son attention sur le flux et le reflux du souffle procure toujours un apaisement des tensions puisque ce simple exercice ramène au primordial. C’est d’ailleurs pour cette raison que la sophrologie y attache une grande importance. Lorsque vous êtes tendu, faites-en l’expérience. Il suffit de compter 10
inspirs et 10
expirs, en se concentrant sur le trajet de la respiration, pour que le calme s’installe et, avec lui, une récupération d’énergie.
La méditation dans la vie quotidienne
Je crois, ajoute Dürckheim,
que chacun devrait avoir son exercice dans son quotidien. Il faudrait trouver l’activité qui se répète tous les jours de la même façon, dans les mêmes gestes… L’astuce proposée : transformer un geste machinal en un acte de pleine conscience. Ce peut être la vaisselle ou même sa toilette. Pendant ce laps de temps, il s’agit d’être entièrement consacré à l’action en train de se faire, sans laisser vagabonder son esprit. Le psychologue invite encore, dans « Le centre de l’être », à redécouvrir le lien entre le geste et l’attitude méditative en prenant pour support le travail manuel.
Le vieil artisan est l’exemple même de l’homme dans cette situation, écrit-il
. Regardez un potier, un céramiste, un cordonnier ! Cet homme est transformé par son métier, transparent à autre chose…
La pratique de l’optimisme
Aucune véritable sérénité n’est possible sans une bonne dose d’optimisme. Ainsi, le moine bouddhiste Matthieu Ricard explique dans « Plaidoyer pour le bonheur » que
l’optimiste sait prendre du recul et reste prêt à envisager une nouvelle solution, sans porter le fardeau de ses échecs précédents et sans s’imaginer constamment que le pire l’attend au prochain tournant. De fait, il conserve sa sérénité. Pour illustrer ses dires, Matthieu Ricard cite le cas d’un ami népalais se trouvant dans l’impossibilité matérielle de se rendre aux Pays-Bas pour y donner une conférence importante, son vol ayant été annulé à la dernière minute.
J’étais extrêmement désolé, lui explique-t-il.
Derrière moi, j’avais pris congé de mes amis de Katmandou, devant moi, ma destination venait de s’évanouir. Me retrouvant sur le trottoir, devant l’aéroport, je m’assis sur mon sac et commençai à plaisanter avec les porteurs et quelques gamins qui se trouvaient là. Je souris en pensant que je pourrais être rongé d’inquiétude, ce qui n’aurait strictement servi à rien. Au bout d’une demi-heure, je me levai et repartis à pied vers Katmandou avec mon petit sac, jouissant de la fraîcheur du crépuscule…
Sylvain Hachet
