Brassaï, l'œil de Paris...

 
Brassaï, l'œil de Paris...
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« La photographie, c’est la conscience même de la peinture. Elle lui rappelle sans cesse ce qu’elle ne doit pas faire. Que la peinture prenne ses responsabilités »... Pour oser une telle phrase, il faut posséder soi-même un certain talent. Ce qui est le cas pour son auteur, Gyula Halás Brassaï, formé à l’académie des Beaux-arts de Budapest. Il est un de ceux qui ont hissé l’art photographique, avec Cartier Bresson entre autres, au plus haut niveau, jusqu’à en devenir un maître incontesté du XXème siècle…

Et pourtant ! Brassaï confie que jusqu’en 1930, il n’aimait pas la photo. Troublante destinée que celle qui lui fait rencontrer, par un hasard auquel il ne croit pas, un futur écrivain américain, Henry Miller, avec qui il déambule des nuits durant dans un Paris authentique que le monde entier va découvrir grâce à ses photos. Henry Miller appelle d’ailleurs Brassaï « L’œil de Paris » et Pablo Picasso est fasciné par la qualité de son regard.

Sous le signe du neuf


Brassaï est en fait un nom d’artiste qui renvoie à sa ville natale austro-hongroise : Brassó. Le photographe s’appelle dans le civil Gyula Halász. Lors d’une des émissions « Radioscopie » chez Jacques Chancel en 1978, il fait remarquer qu’il est né trois mois avant le XXème siècle et que sa date de naissance se résume au chiffre 9. Point n’est besoin d’être féru en numérologie pour déceler effectivement dans ce 9 septembre 1899 (9/9/1899) la prééminence du signe. Sa mère est pianiste et son père professeur de littérature. En 1904, à l’occasion d’un congé d’études à la Sorbonne et au Collège de France, toute la famille s’installe pendant une année scolaire à Paris. Le petit Gyula a alors 5 ans et ce premier contact avec la capitale française le fascine au point d’y retourner 20 ans après. Entre temps, Brassaï, à nouveau en Hongrie, étudie la peinture et la sculpture dans le projet de devenir artiste. Puis il se rend à Berlin et sa nature curieuse l’amène à pratiquer le métier de journaliste, tout en continuant sa formation de peintre. Il côtoie les plus grands, dont Kandinsky. C’est en 1924 qu’il décide de s’installer à Paris pour y continuer sa carrière de journaliste et éventuellement de peintre. Pourtant, l’idée de s’enfermer dans un atelier lui déplaît. Cette ville le fascine et il se demande comment concilier cet impérieux désir d’en découvrir toutes les facettes – même les plus glauques – et celui de pratiquer son art. La coïncidence fait qu’en 1929, quelqu’un lui prête un appareil photo. Ce qui a pour effet de déclencher sa véritable vocation !

L’ombre et la lumière


Nous sommes au début des années 30. Brassaï publie « Paris de nuit » et connaît un succès retentissant. L’œuvre rassemble 62 reproductions photographiques. Il s’agit d’un sublime contraste entre la lumière et l’ombre, entre le Paris illuminé et le Paris lugubre, entre les riches monuments et les bâtisses populaires. Brassaï photographie avec autant de sérieux les sans-abris que les gens du monde. Pas question de photographier en dilettante. Pour Brassaï, chaque photo doit être réfléchie, travaillée, composée. Le travail est fatiguant, écrit-il à ses parents, car je dois parcourir la ville de long et en large… mais je le fais volontiers, je veux que chaque prise soit sensationnelle… Le photographe est pris par une véritable passion.

Un art majeur


En 1933, Pablo Picasso ouvre à Brassaï les portes de son atelier pour sa collaboration au premier numéro du « Minotaure », une splendide revue surréaliste créée par Albert Skira. Une réelle amitié débute entre les deux hommes. Picasso, conscient du talent de son hôte et un brin provocateur, lance : Brassaï n’exploite qu’une mine de sel, quand il dispose d’une mine d’or ! Mais le photographe reste dans son axe, bien décidé à contribuer à faire de la photographie un art majeur. Ce en quoi il n’a pas tort puisque le même Picasso lâche : La photographie est venue à point pour libérer la peinture de toute littérature… Précurseur de l’art brut, Brassaï s’intéresse et photographie les graffitis, les considérant comme des chefs-d’œuvre anonymes. Il raconte d’ailleurs une anecdote savoureuse que lui a confiée son ami Picasso : Alors qu’il patientait dans une banque, le Maître fait un graffiti sur le mur de l’établissement. Le directeur de la banque, lorsqu’il apprit que cette inscription singulière avait Pablo Picasso pour auteur, fit découper le morceau de mur et l’installa chez lui…

La beauté des choses ordinaires


Brassaï, de formation académique, accompagne le mouvement surréaliste même s’il n’y adhère pas toujours. Ce qui le séduit, c’est l’idée que les choses ordinaires ont en elles une beauté que l’artiste se doit de dévoiler. Ainsi, André Breton fait appel à lui lorsqu’il veut illustrer son texte « La beauté sera convulsive ». De son côté, Dali le sollicite pour magnifier l’étrangeté des « Sculptures involontaires ». Brassaï photographie « Le billet d’autobus roulé » (1933), véritable preuve que le regard de l’artiste authentique peut tout transformer en œuvre d’art, à condition de ne rien laisser au hasard.

Une rare empathie


Brassaï aime les mots. Il se sent proche de la tentative de Proust dans « À la recherche du temps perdu ». Tentative de fixer le temps qui faisait dire à cet auteur que la photographie acquiert un peu de la dignité qui lui manque quand elle cesse d’être une reproduction du réel et nous montre des choses qui n’existent plus… Brassaï écrit lui-même avec une extrême lucidité philosophique : Si l’on devait vivre éternellement, tout deviendrait monotone. C’est l’idée de la mort qui nous talonne. C’est la hantise et le désir de l’Homme de laisser une trace indélébile et de son éphémère passage sur cette terre qui donne naissance à l’art. D’où l’importance accordée à cet acte projectif qui porte en lui la possibilité de sublimation, qu’il soit de l’ordre de l’écriture, de la peinture ou du simple graffiti. En 1956, le M.O.M.A (Museum of modern Art) de New York lui consacre d’ailleurs une grande exposition autour de son article : « Du mur des cavernes au mur d’usine ». Parmi ses nombreux ouvrages (17), citons surtout, en 1960, la publication de « Graffiti », constamment réédité et fruit de trente années de recherches. Plus de quarante années plus tard, le tag vient confirmer la pensée visionnaire de Brassaï. Son livre « Histoire de Marie », préfacé par Henry Miller, raconte l’histoire de sa femme de ménage, faisant dire à Miller : Brassaï a cette faculté de pouvoir se placer au niveau de chacun... La psychologie appelle cette faculté l’empathie. Et Brassaï en est pétri.

Suggestion et liberté


Le 8 juillet 1984, s’éteint à Èze, près de Nice, à l’âge de 85 ans, celui qui a véritablement inauguré l’art de la photographie, tout en témoignant d’un profond respect pour ce qu’il fixait sur la pellicule. Aucun jugement dans sa production. Brassaï a mis son art au service de la réflexion, laissant à chacun la liberté de découvrir ou de refuser la beauté qui, quoi qu’il en soit, reste irrémédiablement accolée à la pellicule. Un siècle après sa naissance, à l’aube du troisième millénaire, une grande rétrospective lui a été consacrée au Centre Georges Pompidou, grâce au concours de sa veuve Gilberte, elle-même peintre. 450 de ses œuvres y ont été présentées. Décidément, le chiffre 9 (4 + 5 + 0) poursuit la destinée de cet artiste dont l’œuvre elle-même engendre un regard sans cesse renouvelé.


Christian Benoît

 

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