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L'avis du psy de Signes & sens
Vous traversez une difficulté, vous avez du mal à résoudre un problème, un conflit, à trouver une solution adaptée à une crise affective ou sociale, cet espace d’écriture est le vôtre. Quel que soit votre âge.
« Ma grand-mère boit »
J’ai 18 ans et je ne souffre pas d’hallucinations mais personne ne me croit dans ma famille lorsque je dis que ma grand-mère boit. Elle sent l’alcool quand je l’embrasse. Ma Mammy a 68 ans et je suis très inquiète pour elle, d’autant que la semaine dernière elle est tombée en fin de soirée et elle n’a prévenu mon père que le lendemain matin alors que son bras était très abîmé. Comment faire passer le message ? Violette S. - 13001 Marseille
La réponse du psychanalyste L’alcoolisme est une pathologie grave qui, malheureusement encore à notre époque, est assimilée par l’inconscient collectif à la notion de plaisir et à un manque de volonté de la part de ce type de malade. Ainsi la société – en règle générale – relie-t-elle ce trouble de la personnalité au sentiment de honte. Ces points essentiels peuvent déjà expliquer, en partie, pourquoi votre entourage familial vous donne l’impression de ne pas savoir ou de ne pas s’inquiéter. Or, cette attitude fait partie de ce qu’on appelle aujourd’hui « les évidents cachés ». Si je comprends tout à fait votre désarroi et si je crois absolument vos propos, il faut tout de même que vous mettiez une certaine distance avec le problème de votre grand-mère (et non avec votre grand-mère…). Plusieurs raisons à cela : tout d’abord, puisque vous signalez l’existence de votre père, celui-ci a logiquement le devoir de s’occuper de sa mère, tandis que vous, vous n’êtes « que » la petite-fille de cette dame. Ensuite, il est possible que vos parents, pour vous protéger, ne vous disent pas les difficultés qu’ils rencontrent avec elle car, comme vous pouvez le remarquer puisque votre courrier en atteste, le malade alcoolique est fuyant. Il sait très bien que sa maladie, une fois identifiée officiellement, le conduira à se faire soigner. Cependant, la dépendance psychologique et physique est telle que l’angoisse à résoudre sa problématique lui semble insurmontable, d’où les alcoolisations compulsives quotidiennes. En outre, il faut resituer l’alcoolisme au niveau des rouages inconscients : Sigmund Freud, le maître de la psychanalyse, parle de « bénéfices » psychologiques, « bénéfices » n’étant pas à entendre ici comme dans le langage courant. Seul, un travail en profondeur sur soi peut déclencher la mise en place de l’arrêt progressif et définitif de la consommation d’alcool. Encore faut-il que le sujet malade développe une maturité pulsionnelle qui lui donne l’énergie d’accepter la réalité, et en particulier sa vie telle qu’elle est. Paradoxalement et même si l’ensemble des êtres humains l’ignorent, l’alcoolisme touche des processus psychiques infantiles. Ne dit-on pas d’ailleurs de quelqu’un qui boit qu’il biberonne… En ce qui vous concerne et devant votre inquiétude légitime, plutôt que de rappeler systématiquement à votre famille les craintes que vous avez quant à l’état de votre grand-mère, rendez-lui visite lorsque vous en avez envie. Demandez-lui alors de vous raconter son enfance. Intéressez-vous à ce qu’elle a vécu à cette époque. Vous l’aiderez déjà à se libérer d’éléments qui la gênent, restés fixés au point de la perturber ! Ne dévoilez pas le contenu de ces échanges à votre entourage, ce qui ne manquera pas d’interpeller vos parents. Partant de là, je pense qu’ils dirigeront plus facilement leur regard sur votre grand-mère et qu’ils se détacheront certainement d’une peur qu’ils peuvent avoir à affronter une pathologie déroutante. Vous aurez ainsi, et à juste titre, le sentiment de ne pas abandonner votre aïeule et vous poserez, de surcroît, une pierre solide à l’édifice en participant à la transformation d’une situation qui, non seulement vous semble bloquée, mais régressive et à risques. Votre altruisme sera récompensé, soyez-en assurée, ne serait-ce que parce que vous n’aurez pas le sentiment de rester impuissante ou de vous inscrire dans un processus de non-assistance à personne en danger. Je vous souhaite, Violette, de belles rencontres avec votre grand-mère qui, de son côté, vous apportera – c’est certain – de quoi réfléchir et vous enrichir… Ces rendez-vous inciteront cette femme que vous aimez à ne plus se sentir inutile. Reprenant peu à peu confiance, votre mammy saisira que son devoir à elle consiste aussi à transmettre ce qu’elle a vécu. C’est ainsi qu’elle vous offrira sa force. Son exemple ? Avoir traversé bien des obstacles et s’en être sortie… Elle a quand même 68 ans ! Vous constaterez de fait que, fondamentalement, elle est certainement moins fragile que vous le supposez. Tout ceci également participera à vous désangoisser et votre mal-être se diluera comme il se doit…
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