L'avis du psy de Signes & sens Vous traversez une difficulté, vous avez du mal à résoudre un problème, un conflit, à trouver une solution adaptée à une crise affective ou sociale, cet espace d’écriture est le vôtre. Quel que soit votre âge. « Romane est raptée par sa grand-mère »
Progressivement, ma belle-mère envahit notre couple, sans que ma femme n’intervienne. Au début de notre mariage, la mère de mon épouse avait tendance à nous apporter plusieurs fois par semaine des plats qu’elle avait cuisinés. Puis, il y a sept ans, Romane est née, suivie quatre ans après de Léo. À partir de ce moment, sous prétexte d’aider mon épouse, la mère de celle-ci a accompagné chaque jour l’aînée de nos enfants à l’école, est allée la chercher, lui a fait faire des devoirs (!), pour maintenant l’amener tous les dimanches matin à la messe. J’ai l’impression que Romane est raptée par sa grand-mère qui dépasse vraiment les limites. Tout en n’étant pas incroyant, je trouve inadmissible ce « systématisme » à vouloir emmener notre fille à l’église. Bien que n’étant pas enseignant, je trouve dangereux que ma belle-mère s’occupe des devoirs de ma fille (ma belle-mère était sage-femme). Je suis peut-être bêtement inquiet mais je sens là quelque chose d’anormal...Cyrile A., 79100 Thouars
La réponse du psychanalyste Et vous avez raison, mille fois raisons ! Il faut réagir et
je pense que si vous ne l’avez pas fait plus tôt, c’est pour éviter des conflits qui, de toute façon, sont en route...
Malheureusement, le profil de votre belle-mère se rencontre
plus souvent qu’on ne saurait l’imaginer car ces
personnes-là (comme vous l’induisez très bien) ont toujours
l’art de se déguiser en femme soumise, en Sauveur,
voire en mater dolorosa... Or, il n’en est rien : sous couvert
de morale, de bonne éducation, de principes, elles se
mêlent de ce qui ne les regarde pas ! Bien des enseignants
sont catastrophés de ce type d’incursion inappropriée par
des membres de la famille de l’enfant qui n’ont aucune
compétence pour transmettre quelque savoir que ce soit.
Pire encore : ces « bonnes mamans » sont redoutables ;
effectivement, à coup de « De mon temps, à ton âge, on
savait déjà par cœur ses tables de multiplication » ou « La méthode globale, c’est mauvais, je vais te faire travailler
comme j’ai appris à lire », ces « bonnes mamans » donc perturbent l’écolier et... l’enseignant !
Longue serait la liste d’exemples qui objectivent des « mamies » qui ne savent pas rester à leur place. Tout
aussi grave (voire beaucoup plus, diraient certains) : emmener
systématiquement l’enfant dans un lieu saint, sans la présence de ses parents. Qu’il s’agisse d’église ou de
temple, ces établissements véhiculent un discours très
abstrait pour un enfant aussi jeune que Romane. Or l’abstraction,
pour un inconscient encore fragile puisqu’il a
besoin d’étayage, peut être source d’angoisse. La présence
de la mère et (ou) du père rassure toujours l’enfant
puisqu’il s’agit de ses référents directs. Ce lien privilégié
ancre le petit d’Homme dans les « certitudes » de ses géniteurs,
certes, mais ayant véritablement confiance en eux
et en leur amour, il s’autorisera progressivement à penser
différemment d’eux, si telle est sa sensibilité. À l’inverse,
les grands-parents ne peuvent pas offrir (et c’est tant
mieux) cette même qualité de confiance. Explication.
L’enfant n’acceptera de partir avec le ou les parents de
ses parents que dans la mesure ou ceux-ci l’y encourageront.
Encore que, bien souvent, l’enfant y aille à contre
cœur. Autrement formulé, un grand-parent n’est rassurant
pour l’enfant que dans une relation très intériorisée et
sporadique. Ce sont les parents qui rythment la vie (sociale)
d’un enfant et non pas les grands-parents.
Cependant, et vous vous en doutez bien un peu, vous avez
votre part de responsabilité dans tout cela. Il s’agit maintenant
de casser ce schéma où la grand-mère s’est investie
de rôles et de pouvoirs qui ne sont pas les siens. Peut-être
pourriez-vous, par exemple, le dimanche matin, emmener
Romane et Léo à la piscine ? Quant à vous intéresser à la
scolarité de votre fille, cela vous serait vite agréable... car
on ne se fait pas prendre sa place (de parent entre autres)
par hasard ! Quittez dès maintenant votre petit confort
quotidien et dominical et investissez-vous davantage auprès
des vôtres. Est quand même bien finie l’époque ou
cette « pauvre » Sissi s’est vue dépossédée de ses enfants
par sa démoniaque belle-mère, avec toutes les conséquences
dramatiques que les exigences de l’étiquette de
la Cour, dans ce cas précis, ont entraînées... Il serait utile,
de toute façon, d’expliquer à votre épouse qu’un enfant
n’est pas un cadeau que l’on fait à sa mère. Un enfant est
un sujet à part entière qui ne vit pas pour réparer ou compenser
les manques d’une filiation. C’est ainsi que vous
reconnaîtrez aussi votre femme comme mère et que
vous... l’accaparerez moins... |
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