Attendre que le mystère se lève constitue une des plus belles attentes pour le genre humain. Autrefois (il n'y a pas si longtemps que ça), chacun y allait de son intuition et de ses perceptions pour essayer de connaître le sexe du bébé en gestation. Aujourd'hui, l'échographie donne envie de savoir le plus tôt possible, entraînant des déceptions non avouées quand il s'agit de la venue d'une petite fille alors que le couple attendait un petit garçon... Ou l'inverse. Il faudra " attendre " (quoi qu'il arrive ! ) de se pencher au-dessus du berceau pour que l'amertume des mois précédents se dissipe... Tandis qu'avant l'existence de l'échographie, véritable révolution bienfaitrice scientifique, malheureusement un peu détournée par la naïveté de quelques parents de sa fonction médicale préventive, les grands-mères se prenaient gentiment la tête pour la couleur de la layette : bleu pour un poupon, rose pour une poupée ! C'est ainsi que certaines de ces vieilles mamies, à force de tourment, optaient pour le jaune poussin ou le vert très pâle, certes pas toujours du meilleur effet mais elles étaient bien pardonnables ! Dans un tout autre genre, faisons un détour par le cinéma et la publicité assommante et envahissante d'un film quelques jours avant sa sortie (ladite promotion...) : dans une même journée, sur différents plateaux de télévision, on entend les mêmes acteurs concernés qui répondent la même chose aux mêmes questions des journalistes... Sans compter la bande-annonce qui passe quasiment en boucle, s'immisçant jusque dans les infos politiques ! Ainsi, quand le film arrive sur les écrans, avec cette impression de l'avoir déjà vu, on ne fait pas l'effort du déplacement. Encore une conséquence de la levée prématurée du mystère. Jadis, on faisait davantage confiance au bouche à oreille et ça fonctionnait. Quant à la beauté, elle s'inscrit dans des dérives identiques. Si Coco Chanel a heureusement décorseté la femme, la mode la déshabille maintenant carrément dans la rue : très peu de tissu pour les robes, matières transparentes, le soutien-gorge aux oubliettes, le string de rigueur... Quasiment offerte dès son plus jeune âge, la femme - elle aussi - a donc perdu progressivement de son mystère. Ce mystère féminin envoûtant la rendait inaccessible à la gent masculine qui déployait des trésors d'inventivité pour séduire la belle encore plus belle puisqu'à conquérir de haute lutte. Admirée, elle en était admirable. Mais où sont donc passées les Cléopâtre, Mata Hari et autre Greta Garbo ? Disparues pour laisser place à cette société du tout et tout de suite. Est-il nécessaire de rappeler qu'une femme n'est pas un produit de consommation ? Mais encore faudrait-il que la femme du XXIème siècle décide de se réapproprier son corps en choisissant de l'envelopper d'une atmosphère imprévisible. Elle n'en serait que plus suave... Un pari réussi d'avance.
Fanchon Picaud
