Si le yoga est une vraie technique de relaxation, peut-on prendre le risque d’aborder la psychanalyse en tant que telle?
Dans son principe, il serait certainement une erreur de penser que la méthode freudienne – pendant et après la cure – aboutisse de facto à se relaxer… En revanche, analysants ou analysés sont toujours étonnés par l’état singulier d’une forme de libération lié à ce qui se passe en eux dès l’instant où le transfert opère. Et une fois les noeuds inconscients dénoués, inutile de préciser combien s’avèrent objectifs les résultats positifs, souvent inespérés. Effectivement, même les proches s’en rendent compte, finissant par avouer que Y’a pas à dire : la psychanalyse, ça marche !… En fait, yoga et psychanalyse recouvrent un même champ d’émerveillement : celui de la découverte. De sa découverte. C’est en ce sens que ces deux pratiques offrent en commun la perspective de se sentir bien dans son corps. Il n’est pas rare d’entendre les heureux bénéficiaires de ces outils désangoissants assurer que leur vie a tout simplement changé avec cette rencontre unique qui les a conduits à eux-mêmes.
Bénédicte exprime sa joie intérieure de la sorte : À la suite de la perte de Thomas, mon fils de 19 mois décédé d’une leucémie, des tremblements incontrôlables sont apparus. Mon médecin m’a conseillé de faire quelques séances de yoga. Il y a 10 ans de cela et je pratique maintenant au quotidien. J’ai senti que jusqu’au départ de mon petit garçon, j’avais anesthésié ma dimension spirituelle et émotionnelle. Le yoga m’a sauvée. Thomas s’est incarné, s’est incorporé pour me montrer la Voie. Mon Chemin. Il n’est pas venu pour rien sur terre. Je sais aussi maintenant qu’il veille sur moi. Comme le disait Françoise Dolto, c’est l’enfant qui éduque les parents. J’ajouterai que ce sont nos enfants qui nous guident…
Paul en est à sa troisième année de travail sur lui. Il a choisi de faire une psychanalyse. Ses propos sont significatifs : Mes parents, tous les deux médecins, se sont tués en voiture lorsque j’avais 17 ans, l’année de mon bac, que j’ai raté. Malgré toute la bonne volonté de ma famille, je me suis enfoncé dans des conduites délinquantes et addictives. Un soir de « défonce », je me suis retrouvé à l’hôpital. Deux jeunes internes m’ont pris en charge. J’ai gardé le souvenir qu’ils m’écoutaient religieusement. Ils ont été très intéressés lorsque je leur ai dit que, quinze ans plus tôt, mes parents travaillaient dans cet hôpital. Ils m’ont demandé de revenir les voir régulièrement. Je ne saurais véritablement expliquer comment ce lien de vie avec eux s’est établi. Toujours est-il que je suis retourné les voir. Ils m’ont présenté à un psychiatre, tout aussi dans l’écoute. Alors trop rebelle jusque-là pour accepter la moindre prise en charge médicale, j’entrai progressivement dans une acceptation salvatrice. Au bout d’un an, ce psychiatre me parla de démarrer une analyse. Ce que je fis sans hésiter. Je redécouvre ainsi peu à peu mes parents. Ceux-ci étaient très ouverts et je pense que s’ils me voient, ils sont heureux, en paix et libérés. Excusez-moi... C’est de moi en fait dont je parle. Aujourd’hui, je peux dire que je suis à nouveau heureux, en paix et libéré…
Ce type de témoignages est légion. Car, curieusement, yoga et psychanalyse engendrent — entre autres et aussi — la possibilité de ressentir un moment exceptionnel de la vie et sa particularité : la période prénatale. Chacune de ces deux disciplines, à sa façon, aboutit au fait de ressentir les mouvements de l’Univers. À la manière des bercements intra-utérins. Le yoga, de par ses postures spécifiques, obtient la ré-appropriation de l’équilibre intérieur, en mobilisant les centres énergétiques de l’individu. La psychanalyse, de par la libération de mots censurés, obtient la réintégration de l’équilibre interne, en harmonisant subtilement les zones libidinales de l’individu. Ainsi, dans ces deux médiations, la grande bénéficiaire est l’activité psychique, grâce à la levée des résistances. En somme et sans conteste, yoga et psychanalyse s’imposent comme deux grands arts au service de la relation.
Chantal Calatayud
