Commentant sur la Toile la photo d’un escargot illustrée par le dicton qui disait « Qui va lentement, va sûrement », un internaute anonyme ajoute comme un écho : « Aujourd’hui, tout va de plus en plus vite. C’est probablement la raison pour laquelle plus rien ne va ! ». La remarque n’est pas anodine compte tenu du rythme que nous impose le monde dans lequel nous évoluons. Et si prendre le temps de consulter un voyant contribuait justement à arrêter de courir après le vent pour vivre davantage au plus près de soi ? Nombreux sont les consultants qui en sont convaincus, témoignant du ressourcement que leur a apporté un tirage de tarots, une interprétation numérologique ou encore l’élaboration d’un thème de naissance.
Depuis les origines, l’Homme est en questionnement face à sa destinée. Socrate, le père de la philosophie occidentale, fut le premier à dissocier destinée et fatalisme, tout en ayant recours aux messages des oracles. C’est dans cet esprit que la voyance, s’inscrivant quoi qu’on en dise dans le « Connais-toi toi-même », perpétue une tradition de sagesse, allégée toutefois d’une intellectualisation hermétique qui éloigne du quotidien. Carl Gustav Jung, élève de Sigmund Freud et éminent spécialiste des profondeurs de l’âme humaine, rend – quant à lui – un hommage aux arts divinatoires dans une interview donnée en 1954 à la revue « Astrologie moderne » : Il y a eu beaucoup de cas d’analogies frappantes, précise-t-il, entre l’horoscope et la disposition caractérologique…
La notion d’empathie
Ni antipathie, ni sympathie, telle pourrait être la définition de l’empathie dont doit faire preuve tout voyant authentique. Cet état est comparable à la posture dite de neutralité bienveillante du psychanalyste. Il s’agit de se connecter à une dimension abstraite, source de révélations. Là où le spécialiste de l’inconscient applique une méthode et une méthodologie spécifiques pour en découvrir les arcanes, le voyant utilise la symbolique liée à sa médiation (cartes, runes, boule de cristal…) et sa faculté intuitive. De leur côté, les professionnels n’utilisant aucun support possèdent le don de percevoir des flashs (visuels ou auditifs) en lien avec l’histoire de leur consultant. Dans tous les cas, il est question de déchiffrer un langage semblant venu d’ailleurs mais ayant trait à l’intime. De fait, des situations bloquées se dénouent et induisent un processus salvateur en regard de l’horizon existentiel. L’expérience montre que les meilleures séances ne sont pas celles qui prédisent un événement précis mais plutôt celles qui ouvrent sur une dimension inconnue et passionnante de l’âme. Ma première séance de voyance, confie Marilyn, pourtant sceptique, a été une véritable découverte. J’ai eu pour la première fois de ma vie la sensation que je n’étais pas sur terre par hasard. Aucun conseil dogmatique ne m’a été asséné. Simplement l’impression que tout prenait sens et qu’une énergie bienfaitrice m’accompagnait…
La déontologie du voyant
Bien loin de certains jugements qui prétendent que le voyant exploite la crédulité, la réalité est tout autre. Oswald Wirth (1860-1943), tarologue réputé et unanimement reconnu par ses pairs, écrivait : Ne traitons pas la pratique de la divination en puéril sport intellectuel ou en art d’agrément sans conséquence car le talent divinatoire peut conduire fort loin. Nous ne faisons réellement bien que ce que nous accomplissons dans un esprit religieux, avec conscience et animés d’un sincère désir de rendre service. Le devin exerce un sacerdoce qui est l’ancêtre vénérable de tous les autres… La très grande majorité des spécialistes de la prédiction adhère à une telle déontologie. Pour une infime minorité, leur charlatanisme n’est pas sans bornes car, souligne encore Oscar Wirth, tout a ses limites, même la sottise humaine. Et d’ajouter, si nos devineresses professionnelles se font une clientèle qu’elles conservent, c’est qu’elles lui donnent satisfaction. La remarque est pleine de justesse et c’est faire peu de cas du bon sens de tous ceux qui sont fidèles à leur voyant lorsqu’un rationalisme étroit tente de dénigrer – sans toutefois y parvenir – l’apport de ces consultations singulières qui ont l’immense mérite de faciliter l’accès à un espace jusque-là inconnu de soi-même…
Valérie Marmet
