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                            La psychodans Signes & sens
 
                             
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                                 Aujourd'hui, doit-on instruire ou éduquer ?
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		                 À l’école est demandée l’instruction par certains, d’autres  en attendent l’éducation. Il est un fait que l’image et la  fonction de l’école, sa place, se sont pour beaucoup transformées  au fil du temps.    D’une rapide  plongée dans l’Histoire de l’école et du système scolaire, il  ressort qu’un comité d’instruction publique mis en place à la  fin du XVIIIème siècle fut par la suite réorganisé et  centralisé par Napoléon. Son chef en était le Grand Maître, image  symbolique des relations à l’autre dans un rapport hiérarchique  par là-même préétabli, formalisé, consenti, que l’on  retrouvera dans le système scolaire. Ce titre sera conservé par le  Ministre de l’Instruction Publique dont le Ministère proprement  dit sera créé en 1824 et qui aura, par ailleurs, à épisodes  réguliers, la charge des cultes et affaires ecclésiastiques. Il  s’agit-là d’une surprenante réunion du laïc et du religieux  sous la tutelle d’une même administration, soit de deux secteurs  bien souvent en rivalité quant à l’école dont encore aujourd’hui  existent des traces.			                L’instituteur de la RépubliqueEn 1932, le Ministère change de nom pour  devenir Ministère de l’Éducation Nationale. Ce changement  d’identité, donc ce déplacement significatif autant que  signifiant, s’accompagnera d’une redéfinition des missions –  signifiées – de l’école et des attentes à son égard. Le  discours social ambiant reprend à l’envie des idées battues et  rebattues, images d’Epinal synthétisables en un passéiste avant  c’était mieux que maintenant... Ah l’orthographe ! Ah les leçons  !…, antienne qui porte en germe  l’idée que l’école faillit à sa fonction d’instruction ou  encore procès instruit par une opinion publique déçue par son  école actuelle et qui fantasme un avant magnifié. L’instruction publique,  héritière de la Révolution et de ses valeurs républicaines, avait  en charge des élèves et pour rôle essentiel d’en faire des êtres  de savoir, conformes à une norme sociale. Les contenus primaient. A  l’échelon local, la société s’étayait sur le maire, le  notaire, le curé et sur l’instituteur indissociable du savoir.  L’école, reflet de cette structure, se devait d’instruire lesdits élèves dont on attendait qu’ils acquièrent des savoirs. À  l’école d’alors, l’enfant objet non-désirant, modélisé, se  pliait au désir de l’autre, avec tout ce que cela entraînait  d’inhibition du sujet, assujetti qu’il était justement.  L’instituteur républicain - qu’on se remémore les instituteurs  du début du siècle - incarnait un modèle. L’école publique  était servie par des maîtres, porte-drapeaux de l’Etat, dont la  vocation laïque militante s’apparentait à une abnégation...  quasi religieuse. En opposition à la rétention des « sachants »  antérieurs, l’État affirmait le choix politique d’une croisade  républicaine de transmission du savoir, outil d’ascension, d’ «  élèv-ation », de sublimation. De cette instruction reçue était  attendue en retour la construction de la société.
   Vers la complémentarité…Cet objectif mis en œuvre, l’Éducation  Nationale vit ses attributions élargies. Lui furent assignées des  fonctions de formation physique, morale, professionnelle des jeunes,  ainsi qu’un but culturel, artistique et littéraire. De  l’instruction, on glissa donc à la formation, déplacement du fond  à la forme. L’école, à l’intrascolaire, ajouta – primat  phallique oblige – l’extra, le para, le postscolaire, ayant pour  conséquence de relativiser le contenu quant au contenant, de les  mettre l’un par rapport à l’autre en perspective. La place si  précise, aux contours si nets, qu’occupait l’instituteur du même  mouvement, s’entachera de confusion, deviendra plus floue, ainsi  que plus complexe. L’élève appréhendé en tant qu’enfant  relèvera dès lors de l’Éducation Nationale, l’éducation  familiale étant elle du ressort parental. De plus, la modification  des rythmes de vie et l’évolution de la société amèneront, par  la suite, à attribuer – ou à entériner – une tâche  supplémentaire pour cette même Éducation Nationale : la garde et  la surveillance de l’enfant. Mais la dilatation du temps de  présence de l’école par le biais du périscolaire a pour  corollaire inversé une compression de l’espace parental. Cet état  de fait aux effets pervers s’exprime actuellement dans et par une  situation confusionnelle : qui fait quoi ? Où est la place des  parents et celle des enseignants ? Autrement dit, quelles sont les  limites de l’école ? La substitution initiale de l’école  publique à l’église confessionnelle, quant à l’instruction,  s’est vue déplacée et remplacée par un fantasme de substitution  d’une administration nationale à la famille quant à l’éducation.  L’école alors perçue inconsciemment comme objet d’amour, bon ou  mauvais, est ainsi sujette aux contrôles. De là naissent les  équivoques dans les relations parents/enseignants. De l’école  palliative est attendue une aide due, illusoire, et on est alors dans  un processus d’étayage. À l’inverse, l’école, lorsqu’elle  est fantasmée décevante, devient cible, exutoire, mauvais objet  inconscient. Ou encore, les parents se percevant dépossédés de  leur prérogative éducative s’identifient à l’agresseur  fantasmatique, rivalisent avec lui ; cette situation présente des  intrications complexes, d’autant que tout parent, comme tout  enseignant, enfant devenu adulte, a lui aussi vécu une scolarité  qui a laissé des traces mnésiques. Des lieux de paroles aux  attributions précises ont été mis en place au sein du système  scolaire. Pour ce qui est de l’école primaire s’y réunissent,  outre la municipalité, les parents et les enseignants. Ce mouvement   d’ouverture de l’école à la présence parentale va d’ailleurs  s’amplifiant, témoin l’opération : « La semaine des parents à  l’école ». Encore faut-il en repréciser avec constance et clarté  les motivations, les délimiter, sous peine de générer des  réactions de défense contre un fantasme inconscient d’envahissement  ou une hystérie de séduction dommageables. Demandes et réponses  croisées parentales et enseignantes sont à la base de cette  relation dialectique, en fondent la construction et chacun à sa  place, chacun de sa différence peut alors œuvrer à l’éducation  dans la complémentarité.
   Géraldine Canal     Je doute de tout : pourquoi ?  Ce cycle infernal n’échappe pas aux individus qui souffrent, de  façon récurrente, d’un manque de confiance s’infiltrant dans le  quotidien. C’est Alain qui raconte à son thérapeute que même le  prix affiché de l’essence lui donne à penser que le commerçant  le vole. Au restaurant, il reste convaincu que les terrines sont des  restes arrangés et que tout produit sort tout droit du congélateur.  Sur la route des vacances, il regrette à chaque fois l’axe qu’il  n’a pas pris. Lorsque sa femme lui fait un cadeau, il a la  certitude que ça cache quelque chose... Sa vie est un enfer, dit-il.  Et il n’est pas le seul à souffrir de ce doute qui s’impose,  sans le moindre discernement possible. L’estime de soi ne suffit pas, contrairement à une idée trop  répandue. Le doute pathologique se fait plus diabolique encore en  ses bases. Des parents décrits trop exigeants à l’origine  n’indiquent pas non plus la raison de ces compulsions épuisantes.  La culpabilité, en revanche, pernicieusement, demeure la grande  responsable à prendre au sérieux. Cependant, elle s’avère  difficile à objectiver car le patient en doute...
 Pour que le doute ne soit plus tyrannique, le plus simple est de  s’habituer à vivre en temps réel. Vivre carpe diem fait de vrais  miracles ! Il ne faut pas oublier que la culpabilité vient d’une  époque dépassée pour soi et il est alors normal que le doute  veuille s’infiltrer. Alain a fini par admettre qu’il n’était  pour rien dans le suicide de son grand-père dont il porte le  prénom... Un travail en psychogénéalogie a permis à ce patient de  ne plus douter de son existence...
   Chantal Calatayud |