Le  grand Molière, dans son « Tartuffe », a en son temps  fustigé et ridiculisé le faux dévot. Il demeure ainsi une  représentation plutôt péjorative du vocable « dévotion ».  Le XXIème siècle semble à nouveau en quête de spiritualité  authentique et vouloir lui restituer son sens originel : celui de la  noblesse du statut de serviteur débarrassé de son aspect bassement  « servile »…
			     Selon  le « Dictionnaire Historique de la Langue Française »,  le terme dévotion s’est construit au début du XIIème  siècle à partir du latin devotio, signifiant dévouement, attachement. Faire preuve de dévotion, au  sens spirituel, consiste donc à se vouer sans crainte ni obligation  à la divinité sous son jour personnel. On parle ainsi, dans la  religion catholique, de la dévotion à Marie, sous-tendue par la  pratique du rosaire. Ce comportement spirituel n’est cependant pas  l’apanage de la tradition chrétienne. On en retrouve les principes  dans l’antique Bhakti Yoga indien – qu’il soit de  tradition hindouiste ou bouddhiste –, Bhakti Yoga se  traduisant par Yoga de la dévotion. De nombreux ouvrages  traitent donc d’un sujet qui intéresse des lecteurs en quête de  sens, indépendamment de tout dogmatisme religieux.			     
			     Des  guides pratiques
			       Outre  la Bible et ses « Psaumes » qui abritent un trésor de  poésie dévotionnelle, l’un des ouvrages qui rencontre un grand  succès de nos jours – et dont l’auteur reste anonyme – a pour  titre « L’ange conducteur ». Ce livre, de plus 660  pages, constitue un véritable guide au quotidien de pratiques  dévotionnelles. Il revisite les litanies, explique ce qu’est une  neuvaine, restitue les textes de diverses prières de la tradition  judéo-chrétienne. Plus classique mais toujours actuelle, l’œuvre  de Sainte Thérèse d’Avila, notamment son « Château  intérieur » ainsi que son autobiographie, attire également un  lectorat très vaste. Dans une sensibilité différente, « Le  nectar de la dévotion », évoquant l’œuvre sanskrite de  Srila Rupa Gosvami, traite du Bhakti Yoga. Quant à « La  guirlande de Mukunda », de Paul Martin-Dubost, il dévoile de  merveilleux textes dévotionnels du Sud de l’Inde. Toute la  littérature traitant des mantras tibétains est à ranger aussi dans  ces manuels de dévotion.
			     
Des  ouvrages essentiels
			       Le  psychanalyste Jacques Lacan targuait le Réel d’impossible. Dès  lors, ce n’est certainement pas par pure coïncidence qu’il  théorisa l’importance du « Nom-du-Père » comme garant  d’un épanouissement existentiel. On peut d’ailleurs se demander  à quel point l’engagement religieux de son frère, moine, n’a  pas influencé ses travaux. L’approche dévotionnelle, dans son axe  le plus noble, consiste ainsi à accepter que ce Réel puisse devenir  perceptible à condition qu’un certain état de réceptivité et  d’acceptation 
opère (ou 
Haut Père !). Les  ouvrages du spiritualiste Arnaud Desjardins, lus aussi bien par des  athées que par des croyants, incitent à respecter tout héritage  spirituel. Cette sagesse, reprise par le psychologue des profondeurs  Carl Gustav Jung dans son livre « Réponse à Job »,  induit la nécessité de prendre conscience du contenu archétypal,  voire ésotérique, commun à chaque transmission religieuse. Ainsi, 
Que Ta Volonté soit faite renvoie à la prière de Jésus  mais également à l’enseignement de Ma Ananda Moyi, une mystique  hindoue, dont les ouvrages de spiritualités vivantes se font l’écho.  Les livres de dévotion, toutes traditions confondues, ne sont donc  plus à appréhender comme ils auraient pu l’être du temps où  certaines idéologies prétendaient, avec une orgueilleuse certitude,  qu’il ne s’agissait-là que de publications destinées à  renforcer la religion en tant qu’
opium du peuple. Maturité  et expérience aidant, le lecteur d’aujourd’hui, bien loin d’être  un mouton de Panurge, puise librement dans les livres dits de dévotion  ce qui lui est essentiel et intime. Il délaisse ainsi la froide  rationalisation des esprits et privilégie l’intelligence du cœur…
			     
 
			     Henri Baby