L'audace de
Pierre et Marie Curie

L’audace de Pierre et Marie Curie
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Le couple Pierre et Marie Curie est entré dans la légende, inspirant même à Claude Pinoteau, en 1997, « Les Palmes de M. Schutz », un excellent film tiré d’une pièce de théâtre du même nom. Au-delà de la réalité historique, c’est de passion et d’audace dont il est question. L’histoire d’un couple mu essentiellement par le désir.

Tout comme la foi, le désir peut soulever les montagnes. En ce qui concerne Pierre et Marie Curie, ce fut sous des montagnes de pechblende que le fameux radium attendait d’être mis au service de l’humanité. On ne parlera jamais assez de ces scientifiques humanistes, tel Pierre-Gilles de Gennes, directeur de l’ESPCI de 1976 à 2003 et prix Nobel de physique en 1991, disparu au printemps 2007 trop discrètement. Au début du siècle dernier, Pierre et Marie Curie avaient ouvert la voie, donnant l’exemple d’une complémentarité à toute épreuve, franchissant des obstacles de tous ordres, faisant preuve d’une rare persévérance et surtout ne se glorifiant que d’essayer humblement de participer à l’évolution de l’humanité...

Un autodidacte libre


C’est le 15 mai 1859 que naît à Paris ce fils de médecin : Pierre est le deuxième garçon issu du couple que forment Sophie-Claire Depouilly et Eugène Curie. Quant au grand-père de Pierre, Paul Curie, médecin lui aussi, il est considéré Outre-Manche comme étant l’un des pionniers de l’homéopathie. Bien que de tradition protestante, Paul pense que la religion chrétienne n’est plus en harmonie avec l’évolution de l’Homme. Marié à Augustine Hofer, fille d’un important industriel, cet aïeul qu’il n’a pourtant pas connu marquera certainement l’inconscient de Pierre. Eugène et Pierre en hériteront un humanisme, une générosité et un sens de la liberté qui ne se démentiront jamais. Fidèle à cette libre pensée, Eugène ne donnera aucune éducation religieuse à son fils. Pierre Curie est élevé hors des sentiers battus. Il ne fera pas plus l’expérience de l’école et du lycée. Son caractère curieux, indépendant et rêveur, n’aurait certainement pas supporté les exigences d’une scolarité traditionnelle. D’autre part, la loi de 1881 concernant l’enseignement obligatoire est votée alors qu’il a déjà 21 ans. Entre temps ses parents, son frère Jacques de trois ans son aîné, puis un ami de la famille, M. Bazille, se sont chargés avec succès de son instruction, principalement axée sur les sciences mathématiques et physiques pour lesquelles il se prend de passion. Pierre Curie obtient en 1857 une licence de physique à la Sorbonne. Pour des raisons pécuniaires, il ne continue pas jusqu’au doctorat et accepte alors un discret poste d’instructeur de laboratoire. Les diplômes ne l’intéressent que dans la mesure où ils lui permettent de se livrer à sa véritable passion: la recherche. Avec son frère Jacques, il découvre la piézoélectricité (la déformation mécanique des cristaux sous l’influence des forces électriques). Ils mettent au point des appareils de mesure précis pour étudier ce phénomène. Bien qu’il fut membre, en tant que préparateur puis professeur en 1898 de l’École municipale de physique et de chimie de la ville de Paris, Pierre Curie passe 22 ans dans l’anonymat pour son propre pays, alors que célèbre à l’étranger. Les savants internationaux qui viennent lui rendre visite sont d’ailleurs étonnés de l’état du misérable local dans lequel Pierre Curie fait ses recherches. L’austérité protestante de ses origines s’est ainsi déplacée sous la forme d’une austérité laïque. À cette époque, en effet, une nouvelle religion émerge, prometteuse d’espérance. L’humanité accorde de plus en plus de foi en la Science, longtemps bafouée par un certain obscurantisme religieux. Pendant ce temps, en Pologne, une fille d’enseignants, aussi férue de connaissances que Pierre, Marya Sklodovska, est certainement connectée inconsciemment sur l’ascétique laboratoire… d’autant que la doctrine positiviste d’Auguste Comte, le messager humaniste de ce nouvel espoir pour les peuples, fait des adeptes parmi les intellectuels polonais.

Une battante résiliente


Marya Salomea Sklodowska voit le jour le 7 novembre 1867 à Varsovie. Elle est la dernière née d’une fratrie de cinq enfants dont quatre sont des filles. Sa mère dirige une école, son père est professeur de physique et sous-inspecteur de la rue Nowolpiki. Tout irait bien si la Pologne ne subissait pas à cette époque le joug russe. Celui-ci tente en effet d’affaiblir l’élite locale. Aussi, la famille Sklodowska perd peu à peu ses avantages sociaux : privation de logement de fonction, baisse de salaire… Comme si cela ne suffisait pas, le deuil frappe dès l’enfance. Sophia, la soeur de Marya, décède du typhus puis sa maman d’une tuberculose. Ce que l’on a aujourd’hui coutume d’appeler en psychologie résilience, cette capacité à rebondir positivement sur les durs aléas de la vie, s’applique certainement au psychisme de Marya qui ne s’est pas incarnée pour baisser les bras ! D’autant qu’elle possède trois dispositions qui la rendront brillante et qu’elle est bien décidée à mettre à profit : la mémoire, la concentration et la soif de connaissances – à quatre ans, elle apprenait déjà à lire en regardant travailler sa soeur Bronia de trois ans son aînée –. Marya est placée malgré elle très tôt dans un principe de réalité. Elle consignera par exemple toute sa vie la moindre de ses dépenses tant elle connaît la nécessité et la valeur de l’argent. Pour soulager sa famille, Marya accepte un emploi d’institutrice privée. Elle n’a que 17 ans. Les études supérieures sont interdites aux femmes. Elle donne des cours particuliers, économisant sou par sou l’argent du voyage pour se rendre à Paris. Elle veut poursuivre sa formation. Mais avant de partir elle-même, elle aide Bronia qui possède de quoi régler son voyage jusqu’à Paris et le montant d’une année d’études puisqu’elle veut être médecin. C’est Marya qui, de Varsovie, lui permet de terminer son cursus. Bronia aide Marya à son tour dès l’obtention de son diplôme en se proposant de l’héberger. Marya passe sa licence de physique en 1893, de mathématique en 1894.

Une réelle complémentarité
Au printemps 1894, Pierre et Marie se rencontrent chez des amis communs. Le physicien Josef Kowalski fait les présentations. Pierre a 35 ans, Marie 27. Le courant passe immédiatement. À cette époque, Marie est à la recherche d’un local afin d’entreposer des minerais et des appareils de mesure. Pierre trouve une solution. Toutefois, à la fin de l’année universitaire, ses études terminées, Marie rentre en Pologne pour se consacrer à l’enseignement. Mais Pierre sort de sa réserve naturelle. Dans une lettre écrite le 10 août 1894, il lui demande de revenir. Le mariage est célébré en toute intimité, le 25 juillet 1895 à la mairie de Sceaux. Le couple s’installe à Paris dans un modeste appartement. Marie se consacre à la préparation de l’agrégation de physique, à laquelle elle est reçue première, en 1896. L’année suivante naît leur fille, Irène.

La matière n’est pas inerte !


Ce n’est qu’à partir de 1898 que Marie, bardée de ses diplômes, poursuit ses recherches avec Pierre. Ils se consacrent tous deux à l’étude de la radioactivité découverte en 1896 par Henri Becquerel. Au bout de 4 ans d’efforts, en 1902, Pierre et Marie Curie réussissent à obtenir un décigramme de radium pur. Entrant dans leur laboratoire le soir de leur découverte, quelle n’est pas leur stupeur d’apercevoir dans la pénombre une lueur bleue, presque violette, flotter ! C’est comme la récompense féerique d’un labeur acharné, sans aucune aide extérieure : le couple dépense ses économies pour se faire livrer des tonnes de pechblende dans lequel se cache le lumineux métal. Le labeur est physique autant qu’intellectuel dans le hangar peu chauffé. Les propriétés du radium se révèlent étonnantes. Non seulement il émet de la chaleur, des gaz et des rayonnements mais il transmet son activité aux métaux, aux poussières, aux vêtements qui deviennent radioactifs et phosphorescents. Le monde scientifique qui pensait jusque-là que la matière était inerte commence à remettre en question ses vieilles certitudes…

La consécration
Gloire, invitations, lettres de félicitations sont au rendez-vous après que le 10 décembre 1903, le monde apprenne que l’Académie des Sciences de Stockholm les a choisis, ainsi qu’Henri Becquerel, pour le prix Nobel. On raconte que Pierre Curie a dû imposer son épouse pour cette consécration. L’illustre prix accordé à une femme n’allait pas de soi à l’époque. Le 6 juin 1904 a lieu la cérémonie. Mais tous deux se remettent au travail, ne changeant rien à leur quotidien. La même année, leur fille Ève voit le jour. Ayant le sens de la famille, ils ne manquent pas de consacrer du temps à leur progéniture. Mais est-ce le manque de principe de réalité qui a causé la mort de Pierre Curie qui se définissait lui-même comme un rêveur ? Le 19 avril 1906, âgé de 47 ans, près du Pont-neuf, sans doute perdu dans ses pensées, il ne voit pas la voiture à cheval qui le renverse. Sa femme perd non seulement un être cher mais un compagnon de travail. Aussi n’hésite-t-elle pas à accepter le poste de professeur de physique qu’il occupait dans l’amphithéâtre de la Sorbonne. Elle reprend le cours de son mari à l’endroit même où celui-ci l’avait laissé…

Des applications ambivalentes


L’une des applications importantes de la découverte du radium, la radiographie, pousse Marie à équiper des automobiles prêtées par des amis pour aller examiner les blessés de la guerre de 14-18. Elle forme à la radiologie de nombreux médecins et infirmières. D’autre part, Marie Curie trouve des applications de la radioactivité en chimie, en thérapeutique et surtout en biologie. La curiethérapie, mise au point par Pierre Curie avant leur mariage, vient s’associer à la chirurgie et aux rayons X pour lutter contre le cancer. Mais toute chose en ce monde, y compris la découverte scientifique, possède son corollaire inversé. Pierre était conscient de la lourde responsabilité de l’homme de science… On ne peut concevoir encore que, dans des mains criminelles, le radium puisse devenir très dangereux et ici l’on peut se demander si l’humanité a avantage à connaître les secrets de la nature, si elle est mûre pour en profiter ou si cette connaissance ne lui est pas nuisible, prévenait-il. La féerie du rayonnement possède en effet de redoutables conséquences. Marie contracte un mal mystérieux. On apprendra seulement après sa mort, survenue en 1934, que le responsable était ce même radium qu’elle avait manipulé pendant 35 ans… Les cendres du célèbre couple sont aujourd’hui au Panthéon (Basilique Sainte-Geneviève) et ce, depuis le 21 avril 1995. Une reconnaissance que Pierre et Marie Curie n’avaient pourtant pas cherchée, eux qui n’ont même pas fait breveter leurs découvertes !

 

Gilbert Roux

 

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