La santé et la forme
      dans Signes & sens

      Homosexuel et séropositif,
      Michel transmet
      sa rage de vaincre…

      Homosexuel et séropositif, Michel transmet sa rage de vaincre…
      ©iStock

      Pour la psychanalyse, toute somatisation est l’extériorisation d’un conflit interne. Le paradoxe de la séropositivité réside dans le fait qu’elle est une maladie potentielle. Telle une épée de Damoclès, celle-ci peut heureusement rester toute une vie non-manifestée. C’est le cas, parmi beaucoup d’autres, de Michel dont la résilience est peut-être liée à sa capacité consciente et inconsciente à entendre que dans séropositif, il y a justement le mot… positif.

      Signes & sens : En psychanalyse, comme dans d’autres métiers, le secret professionnel est une évidence. Vous acceptez aujourd’hui de nous parler de votre expérience : vous êtes séropositif. La maladie généralement induit des aspects tabous plus ou moins en avant chez chacun d’entre nous, et la séropositivité plus que tout autre. Pour cette raison, nous avons décidé d’un commun accord de ne pas préciser votre identité civile. Cependant, il est important que vous puissiez vous positionner en temps qu’être dans un rapport espace-temps. Voulez-vous vous présenter ?
      Michel :
      J’ai 37 ans. Je suis célibataire. Je vis éloigné de ma famille qui est dans le sud de la France et moi à Paris. Mais je la vois régulièrement. Et puis le téléphone, ça fonctionne bien… J’exerce la profession de journaliste.

      S & s : Célibataire pourquoi ?
      Michel : Célibataire… pas toujours. Quelquefois, je ne suis plus célibataire… J’ai une vie, comment dire… un peu en marge de ce qu’on appelle la normalité.

      S & s : Liée à l’homosexualité ?
      Michel : Ah oui, oui !


      S & s : Que pourriez-vous dire de votre lien familial ?
      Michel : Le lien à ma famille est un peu particulier dans le sens où je suis issu d’un milieu modeste, ouvrier. J’ai franchi un cap. Je me suis élevé socialement. Culturellement, il y a quand même une certaine différence. Ma mère et mes frères me considèrent comme celui qui a réussi. Mais parfois je ressens qu’ils ne comprennent pas vraiment…

      S & s : Ils ne comprennent pas ce que vous faites?
      Michel :
      Ce que je fais et ce que je suis.

      S & s : Aucun d’entre eux n’est au courant de votre homosexualité et de votre séropositivité ?
      Michel : A priori non. En ce qui concerne l’homosexualité, je pense que même si cela fait partie du non-dit, ils ont compris… Mais c’est un sujet dont ils ne parlent pas.

      S & s : C’est sujet tabou ?
      Michel : C’est tabou sans l’être. Je pense que ma mère a compris et que ça ne la gêne pas plus que ça…

      S & s : Pourquoi ne pas le verbaliser alors ?
      Michel : J’y ai pensé il y a quelques années et puis… ça n’est plus d’actualité… Maintenant, c’est trop tard à mon avis…

      S & s : Il y a une différence entre séropositivité et sida...
      Michel : En tant que séropositif, je ne suis pas malade. Le sida est déclaré lorsque l’on contracte une maladie opportuniste pouvant se traduire par des diarrhées, problèmes aux yeux ou la tuberculose par exemple. Le système immunitaire s’est effondré et laisse place aux maladies infectieuses... Je sais que je suis séropositif depuis au moins 11 ans et j’ai commencé à voir un médecin il y a 6 ans, donc cinq ans après savoir consciemment que j’avais le H.I.V dans le sang.

      S & s : Il vous a donc fallu un certain temps pour accepter une aide extérieure, une aide médicale, voire psychologique ?
      Michel : Bon, pendant quelques années je me suis voilé la face. Je ne voulais pas savoir, pas voir, alors que je savais…

      S & s : Cela se traduisait de quelle façon ?
      Michel : Par de l’agressivité, une révolte. J’étais pressé. Je pensais que l’échéance était courte. Il fallait que j’aille vite, que tout aille vite. Que je devienne ce que je suis aujourd’hui, très vite. Donc, j’ai mis les bouchées doubles, j’ai beaucoup travaillé. Je me suis vraiment épuisé au travail pour en arriver là où j’en suis. Et puis les années passant, j’étais moins révolté, moins colérique, coléreux et à partir de là, je me suis dit… bon… où j’en suis sur un plan santé ? Je n’avais pas eu d’alerte particulière… Un jour, je suis allé voir un médecin.

      S & s : La séropositivité, et la révolte que cela a générée en vous, semblent vous avoir permis d’élaborer et de développer votre désir professionnel ?
      Michel : Oui, bien sûr. Parce qu’autour de la séropositivité, il y a aussi de grosses angoisses. Quand on perd des proches qui meurent de cela et à l’époque très vite (les traitements n’étaient pas efficaces au sens où on les connaît aujourd’hui), on se dit oh la la ! Et donc oui, j’ai mis les bouchées doubles pour y arriver, me faire connaître et reconnaître dans mon travail.

      S & s : Cela peut paraître paradoxal mais la séropositivité vous a permis d’aller dans un sens d’évolution ?
      Michel : Oui. Tout à fait évolutif. Séro-positif, c’est positif parce que grâce à ça, j’ai réussi ce que je voulais faire, professionnellement en tout cas. Affectivement, c’est autre chose…

      S & s : Comment vivez-vous ce registre ?
      Michel : En ce qui me concerne, peu de gens le savent. Parce qu’on apprend à tester les personnes. Il y a ceux qui le reçoivent bien… Et ceux, malgré eux d’ailleurs, qui ont un mouvement de retrait, qui ont peur. Sur un plan plus intime, c’est un peu pareil.

      S & s : À votre avis, est-ce lié à la peur de la différence ou à la peur de la mort ?
      Michel : Non, pas la différence. Je crois que c’est la peur de la mort. On vit dans une société où l’on ne voit pas la mort. On la cache à tout prix. On cache nos morts… et de voir quelqu’un de vivant condamné…

      S & s : Condamnés, nous le sommes tous...
      Michel : Oui mais condamné à brève échéance… Bien que cela change encore. Les traitements repoussent cette échéance, à l’heure actuelle on ne sait même plus… Mais oui, les gens ont peur de ça, peur de la mort. Dans mon métier, je suis souvent appelé à voir la mort de près. Je me retrouve près des populations pour qui la mort est quotidienne… Le sida qui décime, des cadavres dans les rues, les rivières, des tueries. Peut-être parce que je suis séropositif, j’en ai une vision différente depuis quelques années. Je relativise peut-être plus. Je relativise aussi, parce que lorsque je suis en Afrique par exemple et que je vois les populations mourant de maladies opportunistes dont on ne meurt plus en France, je me dis que les Hommes ne sont pas encore égaux entre eux… Je relativise en me disant que j’ai la chance d’être né dans un pays développé, un pays riche… La différence, elle est là.

      S & s : Selon vous, votre séropositivité serait un mécanisme autopunitif, lié au fait qu’être homosexuel est encore perçu de façon négative par la société et les familles en général ?
      Michel : Non, je ne me flagelle pas avec ça. Au départ, j’ai été en contact avec le virus, à un moment donné de ma vie où l’on savait peu de choses à ce sujet. On a commencé à dire qu’il fallait mettre un préservatif en 84-85. Moi, j’étais en province et si à Paris, cela commençait à rentrer dans les mœurs, le sida en province paraissait plus lointain… Mais comme la plupart des garçons de 35-40 ans, il y a eu un comportement à risques durant un certain temps, que l’on regrette bien évidemment. Parce qu’être séropositif pose des problèmes dans la vie quotidienne. Le suivi médical, les rendez-vous de façon discrète, dégager des journées pour les bilans sanguins et rencontrer le médecin, tout cela sans en parler autour de soi ou très peu… Je regrette mon comportement à risques de ce moment-là, parce que ça m’aurait évité bien des angoisses depuis… Mais comme je l’ai déjà dit, d’une autre manière, j’y ai tout gagné car je suis devenu résilient.

      S & s : Si vous aviez à formuler un vœu ?
      Michel : À l’heure actuelle, ce serait lié au H.I.V. Que l’on ait une meilleure connaissance du fonctionnement du virus, ce qui amènerait des traitements d’autant mieux ajustés et qui dédramatiseraient le fait d’être séropositif. Arriver à ce que tous les séropositifs bénéficient de traitements très simples et dont on soit sûr de l’efficacité à long terme.

      S & s : Que signifient pour vous les mots chance et malchance ?
      Michel : Pas grand'chose. Je crois que la chance, on se la crée et la malchance aussi. Il y a quelques années, je me disais : Tiens, encore un échec… encore un échec… mais je vais construire dessus. Quelque part, cette façon-là m’a réussi. Parce que j’essaie à chaque fois de me corriger, de m’améliorer. J’ai construit sur des échecs, je m’en suis servi dans un sens plus... positif ! Lorsque l’on tente d’analyser pourquoi il y a échec, c’est parce qu’à un moment donné on a « déconné », on n’a pas fait ce qu’il fallait faire à ce moment précis. Voilà, cette année-là, je n’avais pas de préservatifs sur moi…

      S & s : On peut donc introduire que le hasard n’existe pas. Chacun attire les diverses situations de sa vie. On est libre ensuite de leur donner un sens évolutif ou pas ?
      Michel : Oui, ça s’appelle aussi le destin. Mais je ne sais pas… On rentre dans des considérations liées à la foi… Bon, j’ai été baptisé… Je ne suis pas pratiquant mais je doute. Ça m’intéresse, ça m’interpelle, mais je doute.

      S & s : Le doute amène à l’interrogation ?
      Michel : Oui. Je suis privilégié finalement puisque je sais plus que d’autres que je vais mourir. Donc, ces questions-là je me les suis posées… Et c’est vrai que c’est rassurant de se dire qu’il y a peut-être un ailleurs, que l’on va se réincarner, que c’est la vie éternelle qui nous attend… Mais on peut tout aussi bien se dire qu’après la mort, il n’y a rien et donc autant faire tout ce que l’on peut de son vivant. C’est pour ça que je fonce, je profite de la vie. Je voudrais rajouter que les connaissances sur le sida ont énormément évolué. Finalement c’est allé très vite, heureusement pour nous d’ailleurs ! Malheureusement, beaucoup d’autres sont morts, beaucoup trop. Mais c’est vrai que l’on a très vite découvert d’autres molécules antivirales qui permettent de stabiliser les gens, l’évolution vers la maladie. Aujourd’hui, il y a entre 200 et 300 mille séropositifs en France, ce qui signifie qu’il y en a au moins un, proche de chaque famille française. Les familles ne le savent pas forcément, les séropositifs n’osant pas affronter les réactions familiales. La séropositivité génère une peur certaine dans tous les milieux. Même dans le milieu médical, soignant, il existe encore des a priori envers les séropositifs.

      S & s : Votre témoignage induit que la manière dont on gère les angoisses influence sans aucun doute l’évolution de la séropositivité. Pensez-vous, qu’à ce sujet, une aide sur le plan psychique soit importante ?
      X : Oui, bien sûr. Il est clair qu’il y a des séropositifs qui ont besoin d’un soutien, d’un appui psychologique. Ce système fonctionne déjà. Beaucoup d’associations agissent dans ce sens. Mais pour mon cas personnel, pour l’instant, je n’en éprouve pas le besoin, je me sens assez fort pour le gérer seul. C’est mon caractère de fonctionner seul. Et pour l’instant cela me réussit. Je prends un traitement depuis plusieurs années alors que je n’ai rien. Je vis tout à fait normalement : je fais du sport, je marche beaucoup, je suis très actif. Pourtant, je prends des médicaments matin et soir…

      S & s : Puisque tout va bien, pourquoi les prenez-vous ?
      X : C’est mon instinct de vie qui prend le dessus. Sans ces médicaments, je me mets en danger, même si pour l’instant tout va bien. Mais il y a plein de personnes qui ne réalisent pas l’importance des traitements et qui stoppent alors qu’ils leur sont nécessaires. Moi je fonctionne en sens inverse maintenant. Il m’est arrivé l’an dernier d’être en panne de médicaments. J’étais hors de France et ne pouvais donc pas les faire renouveler. Durant une semaine plus de médicaments… J’étais très mal, très angoissé de ne pouvoir les prendre, je me sentais menacé.

      S & s : Vous donnez l’impression d’être parvenu à une acceptation de votre séropositivité.
      Michel : Peut-être, c’est possible. Dans les premiers temps, j’étais plutôt agité. Je voulais tout planifier pour le cas où… Et puis les années passant, je me porte toujours bien, et j’en suis arrivé à me dire que si ça se trouve, je mourrai dans un accident de voiture ou autre chose… Donc, comme je ne sais pas ce qui m’attend après, autant en profiter maintenant !

       

      Propos recueillis par Isabelle Roux

       

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